On en avait entendu des choses alléchantes sur la Dominique avant de venir ! C’était pour nous une escale à ne pas manquer, sur notre route à travers les Petites Antilles. Malheureusement, dans la nuit du 18 au 19 septembre 2017, le cyclone Maria est passé en plein sur l’île et a laissé énormément de dégâts derrière lui. Malgré cela, les habitants de cette île aux mille forêts et montagnes se battent pour offrir aux visiteurs la possibilité de la découvrir, et toujours avec le sourire d’ailleurs !
Note : Les Vrai ou Faux de cet article sont purement subjectifs et liés à notre expérience et à notre vécu au moment où nous étions sur l’île de la Dominique, à savoir début mars 2018.
On nous avait dit que le canal entre la Martinique et la Dominique était le plus difficile à passer (en terme de houle et de conditions de vent)
Pas pour nous ! Les conditions météo très clémentes que nous vivions depuis quelques jours avec Saturnin lors de notre escale à Saint Pierre, au nord de la Martinique, se sont poursuivies lors de notre traversée du canal vers la Dominique. C’est-à-dire très peu de vent, 15 nœuds tout au plus dans le canal, et donc très peu de houle:) A peine 1 m de creux, on n’a pas l’habitude de ça entre deux îles des Caraïbes !
Saturnin naviguant à nos côtés
On peut donc dire qu’il n’y a pas vraiment de bon ou de mauvais canal. Chaque batocopain croisé a de toute façon vécu des conditions totalement différentes quel que le soit le canal navigué… Tant mieux pour nous à ce moment là en tout cas, marre de se faire secouer dans tous les sens aux Antilles!
On nous avait dit qu’il y a avait très peu de mouillages à faire en Dominique
Vrai. Au début, après notre départ de Martinique dans la matinée, on comptait s’arrêter au sud de l’île, dans la baie du village de Soufrière (encore un Soufrière tiens!). Seulement, il est interdit d’y mouiller, c’est une réserve naturelle protégée. Dommage, car le relief impressionnant, les montagnes qui s’entrecroisent au loin et la baie calme à l’abri d’une petite presqu’île donnaient forte impression de loin !
On continue vers le nord vers le mouillage devant la capitale : Roseau. Des boysboat viennent aussitôt à notre rencontre dans la baie. Ils nous souhaitent la bienvenue avec le sourire mais nous annoncent que le mouillage ici se fait seulement sur bouée. Interdiction de mouiller sur ancre. Le souci, c’est qu’une mauvaise odeur d’égouts règne dans l’air, la vue sur la ville, les grues et les débarcadères n’a rien d’attrayant et on nous demande 15€ pour passer la nuit ici sur bouée. Cet argent leur serait sans doute bien utile après le cyclone mais les à-côtés ne sont pas engageants du tout.
Un peu dépités, on continue donc notre route. Le soleil décline, il est trop tard pour monter au nord jusqu’à Portsmouth. Tout en cherchant le long de la côte un lieu pour la nuit, il faut commencer à éviter les troncs d’arbres flottants à la dérive. On avait été prévenu mais on est quand même vite surpris ! « Mais c’est quoi ce gros truc qui vient de passer à ras du bateau ? » « Pxxxx, un tronc ! « On a eu de la chance, faut faire gaffe ! Je barre, tu vas à l’avant surveiller ? » Rejetés à la mer suite au cyclone, volontairement ou non, ce serait quand même dommage de s’en prendre un par faute d’inattention.
Avant le coucher du soleil, on finit par jeter l’ancre au pied de l’aéroport de Canefield, un peu plus au nord, à Pringles Bay exactement. On se sent un peu comme des clandestins ici, c’est protégé de la houle (et encore !), on est dans 6m d’eau mais ce n’est pas un mouillage à proprement parlé. Il est juste convenable pour faire une pause sur la route…
Départ tôt le lendemain matin. Objectif, rallier notre dernière possibilité de mouillage, la baie devant la ville de Portsmouth au nord. Pas de souci ici, Prince Rupert Bay est plutôt jolie, il y a des bouées certes mais c’est autorisé de mouiller sur son ancre.
Note : On préfère toujours utiliser notre propre mouillage, au-delà du fait que c’est gratuit, on n’a pas forcément confiance en des bouées installées depuis on ne sait combien de temps. Bon, on apprendra plus tard qu’elles sont très récentes ici. Tout avait été dégagé par Maria et ils ont réinstallé et inauguré des nouveaux mouillages pour permettre aux bateaux de revenir.
On nous avait dit que tout avait été ravagé à cause de Maria
Vrai. Enfin tout, c’est un bien grand mot mais l’île a vraiment souffert. Sa végétation surtout, on ne voit au loin que les troncs des arbres restants sur les sommets. On dirait que les montagnes ont été brossées à rebrousse-poil ! Au final, ce sont les cocotiers qui s’en sortent le mieux, un peu déplumés certes, mais ils sont plus réputés pour tenir.
Dans les villes et villages, les maisons ont été sérieusement secouées. Partout, on peut voir des toits manquants ou alors refaits à neuf depuis. Certaines maisons sont même complètement rasées, il n’y a plus que les fondations et un peu de bric-à-brac qui traîne. On a croisé une maison où il ne restait que le sol et un réfrigérateur ! C’est vraiment dommage pour les habitants, qui se sont presque tous retrouvés sans chez-soi, en l’espace de moins de 24h…
Location de 4×4 et tour de l’île
Nous avons loué un 4×4 (il n’y a que ça à louer) à Portsmouth, afin de faire le tour de l’île. Nous avons pris d’abord vers l’est, pour longer la côte Atlantique. C’est là qu’on peut imaginer sans peine la puissance du vent de l’ouragan quand on regarde aux alentours… Mais les petites criques restent quand même mignonnes et les villages aussi.
Ce qu’on a trouvé quand même impressionnant, suite à ce tour en voiture, c’est que vraiment aucun coin de l’île ne semble avoir été épargné ! Comment réaliser après coup, nous qui venons plusieurs mois après la bataille, qu’en à peine 24h la végétation ait pu être autant décimée ? Il faut désormais laisser le temps que la nature reprenne ses droits, pour que le paysage revienne comme il devait être avant…
Note : La location du 4×4 nous a coûté 140$EC (soit environ 42 €) par jour, soit environ . Cela revenait nettement moins cher que prendre un guide pour faire le tour de l’île avec lui. En se renseignant à Portsmouth, ça nous aurait coûté 500$EC (soit environ 150 €) pour deux pour une journée, un peu cher quand même.
Malgré ce décor presque apocalyptique, les habitants, eux, reconstruisent patiemment leurs habitations. Le ballet des camions, grues, pick-up est incessant aux abords des villes, transportant matériaux, planches de bois et outils pour réparer encore et encore. Certaines maisons obtiennent une nouvelle charpente en bois pour leur toit tout neuf, d’autres sont consolidées avec des matériaux légers comme de la tôle. Lors de notre clearance à notre arrivée à Portsmouth, nous sommes passés à pied près d’un ponton où un cargo débarquait ses matériaux de construction. Le bureau des douanes étaient plein à craquer de Dominiquais venus faire tamponner leurs papiers pour récupérer des biens et de quoi réparer leur chez-eux.
Et les routes dans tout ça ? C’est praticable ?
Il faut quand même qu’on parle aussi des routes, pour mettre en garde ceux qui voudraient comme nous louer une voiture. Toutes les routes que nous avons prises ont été déblayées des arbres. Mais sur la route principale, sur la côte ouest, la bordure de la route s’est par endroit effondrée, ainsi que quelques ponts (on prend un accès dévié), il faut faire attention et on ne conseille pas de rouler de nuit. Mais on ne sait pas si tout date d’avant ou d’après septembre.
Ce qui nous a le plus embêté sur les routes (en dehors du fait qu’ils roulent à gauche et souvent très vite) c’est la quantité de nids de poule ! Tous les 200 m voire moins, un gros trou se trouve au beau milieu de la chaussée, rendant la conduite plutôt difficile. On ne peut pas tous les éviter, on finit toujours par s’en prendre un, et je serrais les poings pour ne pas abîmer le bas de caisse de notre voiture de loc. Certaines routes sont vraiment abîmées, et certaines plus petites ressemblent plus à des chemins de terre très pierreux. On comprend mieux pourquoi ils ne louent que des 4×4 !:)
On nous avait dit que l’île était pauvre mais que ses habitants étaient super accueillants, toujours avec le sourire
Plutôt vrai. Rien à voir effectivement en terme de niveau de vie et d’infrastructures avec l’île au sud, la Martinique et l’île au nord, la Guadeloupe. Mais c’est difficile aussi de se faire un vrai avis avec les conséquences du cyclone… Ils ne semblent pas moins lotis que les îles des Caraïbes que nous avons visité au sud. On a même trouvé un air de ressemblance finalement avec Tobago, avec la végétation dense, les petits villages de maisons colorées et la capitale Roseau.
En tout cas, les habitants sont vraiment très sympathiques. A Portsmouth, quelques gars ont créé une association, nommée PAYS, pour gérer le mouillage dans la baie. Ce sont en gros les boysboat du coin. Ils s’occupent des bouées, font taxi pour aller aux quatre coins de la baie et peuvent te dépanner pour plein de choses.
C’est à cet endroit qu’on peut débarquer, sur leur ponton en face du local PAYS sur la plage. Malheureusement, nous avons essuyé un vent de sud-ouest sur quelques jours, levant une houle directement dans la baie. Les vagues déferlant sur le sable ont détruit une partie du ponton en deux jours ! On débarquait donc en annexe dans les rouleaux, pas très marrant. Et sur le bateau, c’était tout aussi inconfortable ! Heureusement, ça n’a pas duré très longtemps.
On nous avait dit que c’était une île magnifique, pour ceux qui aiment la forêt, les randonnées, les cascades
Vrai ! Bon, certes, avec tout ce qu’on vous a dit précédemment, on peut douter qu’il reste quelque chose à voir. Mais les Dominiquais ont vraiment mis un point d’honneur à déblayer la plupart des sentiers de randonnées ainsi que certains lieux touristiques. Après tout, le tourisme est sans doute pour eux une de leur principale source de revenus.
Lors de notre tour de l’île en voiture, nous avons pu accéder sans trop de difficultés (à part les routes qui sont mauvaises) à plusieurs sites différents à travers l’île.
Emerald Pool est une cascade tombant dans un joli bassin de couleur émeraude.
Les souches des arbres déracinés le long du sentier vers Emerald Pool…
Le Fresh Water Lake est un lac dans les montagnes, situé dans le Morne Trois Pitons National Park (morne veut dire colline ou montagne). Malheureusement pour nous, une brume épaisse recouvrait tout le lac et on n’y voyait pas à plus de 10 m…
Les Trafalgar Falls sont deux impressionnantes cascades au centre de l’île. La Papa Fall, dont son eau provient du Fresh Water Lake, est haute et fine tandis que la Mama Fall juste à côté est plus petite et plus large, et ne provient pas de la même source.
Mama Fall
Papa Fall
Le petit village de Wotton Waven dans le même coin est connu pour sa source de soufre (et son spa de sources chaudes mais nous ne l’avons pas fait). La fumée (qui sent un peu l’œuf pourri il faut l’avouer) se dégage du sol suite aux activités volcaniques de l’île. La chaleur fait même bouillir l’eau qui passe au dessus. Il y a plein d’autres sources de ce type disséminées sur l’île, car la Dominique compte pas moins de 9 volcans encore actifs !
Note : Pour avoir l’accès à tous ce type de sites, il faut à chaque fois payer un Site Pass à un garde forestier, qui coûte 5$US. On peut prendre celui à la semaine (12$US), qui donne accès à tous les sites. Nous avons acheté celui-ci, plus rentable, à la station service de Portsmouth.
Un des endroits que nous avons préféré, c’est la visite du Fort Shirley sur la presqu’île de Portsmouth, dans le Cabrits National Park. Proche de la ville, il est accessible à pied en un quart d’heure. Entièrement rénové plusieurs années auparavant, il a complètement résisté à l’ouragan. Les habitants ont nettoyé les alentours des arbres et le site est vraiment magnifique. On a adoré se balader autour du fort et à l’intérieur car tout est ouvert. On peut ensuite monter sur la colline, pour avoir une belle vue sur la Guadeloupe.
On nous avait dit qu’on pouvait voir la maison de la sorcière, en l’occurrence Calypso, du film Pirates des Caraïbes
Faux. Plus maintenant en tout cas… La pauvre est désormais ensevelie sous une montagne d’arbres tombés. Elle se situait le long de l’Indian River à Portsmouth. Cette rivière est très connue et c’est l’un des endroits incontournables de la ville. On la remonte en barque, avec un guide, ( le notre, c’était Raymond), qui nous emmène à la rame sur les anciens lieux des indiens Caribes. Il nous explique un tas de choses sur la faune, la flore et l’histoire de l’île. C’est très paisible, on aperçoit des crabes sur les berges, dans les racines, ainsi que de nombreux oiseaux, avant d’atteindre un petit bar reggae au bout. On a eu de la chance, il faisait très beau quand nous y étions, car il pleut très souvent sur Portsmouth !
Note : Nous avons payé 100$EC (soit environ 30 €) la balade pour deux personnes avec un guide sur l’Indian River. En plus de ça, il ne faut pas oublier le Site Pass dont on a besoin également pour cette activité (5$US si on n’a pas le pass à la semaine).
Il y a de nombreux autres sites du tournage des films Pirates des Caraïbes sur la Dominique. Notamment le moment où Jack et Will se battent sur une roue de moulin à eau, lancée à toute vitesse dans la jungle. Ou encore le village des cannibales où tous les personnages doivent passer à la casserole. Mais comme ce sont des scènes tournées dans la forêt ou des constructions principalement en bois, nous n’avons rien vu lors de notre passage en voiture… C’est même fort possible qu’on ne voyait pas grand-chose avant l’ouragan !
On nous avait dit que la randonnée vers le Boiling Lake était dure mais superbe et qu’on y entendait des sifflements étranges tout le long du sentier
Vrai. Déjà, c’est tout simplement dur à trouver ! Il faut prendre les petites routes de montagne à partir de Roseau, celles qui mènent vers le Morne Trois Pitons National Park. Arriver ensuite au minuscule village de Laudat et prendre une descente sur la droite à une fourche. Au niveau d’une statue, prendre à gauche et rester tout le temps sur la gauche. On passe une petite centrale électrique et on arrive sur un parking au pied d’une rivière.
Là, on accède d’abord à pied aux Titou Gorges Falls, où on peut se baigner dans l’eau claire et fraîche entre deux falaises étroites, jusqu’à une cascade. Sur la droite de ce site, le sentier s’élève dans la forêt, c’est le début de la randonnée vers le Boiling Lake, passant par la Vallée de la Désolation. Le lac bout car l’eau stagne juste au dessus d’une fumerolle rejetée par la terre. Dans la vallée en amont, rien ne pousse à cause du soufre qui émane aux alentours.
Damien qui hésite à sauter dans l’eau froide.
Mais il l’a fait !
Un guide rencontré à Portsmouth nous avait mis en garde : « You will never find the lake by yourselves ! » Il proposait alors 700$EC (soit environ 210 €) pour deux personnes, pour la randonnée avec lui + le trajet en voiture. On avait trouvé ça super cher donc on a voulu tenter notre chance par nous-mêmes. A vrai dire, un panneau indique aussi juste avant le sentier : 3h de marche aller-retour, pas conseillé de partir après 10h, etc. Il est 11h pour nous, il ne fait pas beau du tout, on se dit qu’on va faire un petit bout de chemin sans pour autant se mettre la pression d’atteindre le lac.
La randonnée n’est pas facile, marchant sur un sentier ponctué de marches ou de rondins de bois, très glissants à cause de l’humidité ambiante. Ça grimpe et ça descend presque sans arrêt entre les vallées et les montagnes. Il fait tellement gris que quand on arrive sur un sommet au bout d’1h30 de marche, on ne voit rien du tout aux alentours ! Pas de point de vue sur la Vallée de la Désolation… Même si la randonnée reste sympa à travers cette nature, on a la flemme de continuer, les arbres ne sont plus ce qu’ils étaient et en plus, il pleut… Tant pis pour nous, ce ne sera pas pour aujourd’hui le Boiling Lake, on préfère rebrousser chemin.
Au retour, un garde forestier nous dira qu’il fait presque toujours ce temps là ! Mais aussi que là où nous étions, il restait encore 1h30 pour atteindre le Boiling Lake…
Au début, la végétation est encore dense, on se croirait en pleine jungle !
Mais plus on monte, plus ça devient clairsemé. C’est même un gros bazar autour du sentier !
Petit ami rencontré sur le chemin… 🙂
La vue en haut du plus haut sommet de la randonnée…
Comme sur la plupart des autres lieux visités, nous étions presque les seuls touristes. On ne croise pas un chat ici. Mais on entend de drôles de bruit ! La faune est importante sur la Dominique et lorsque nous étions au cœur de la forêt, nous commencions à entendre un sifflement très étrange, comme un air de musique triste répété autour de nous. Le son se rapproche et s’éloigne, on peut commencer à s’imaginer des choses entre les troncs d’arbres, qu’on est suivi par quelqu’un par exemple… Mais Morgane, la sœur de Damien, qui avait déjà visité l’île l’année précédente avant l’ouragan, nous avait prévenu. Il s’agit du Siffleur des Montagnes (Siflé Moutany en créole) un petit oiseau qui émet ce son si particulier et insolite !:)
Je pense qu’il faudrait attendre quelques années avant de retrouver la Dominique d’avant, avec sa belle végétation luxuriante, bien que nous, nous le l’avons jamais vu du coup. Peut-être y retournerons nous un jour, sur notre trajet retour à la voile, qui sait ? En tout cas, ça vaut quand même le coup d’aller y faire un petit tour, les cascades restent bien jolies par exemple. Et ça permet de les aider aussi !